Le cheveu de Muʿawiya jusqu'au 31 octobre 2023 (2023)
Le cheveu de Muʿawiya
« S’il n’y avait entre moi et mes sujets qu’un cheveu, je le relâcherais quand ils le tirent, et le tendrais quand ils le laissent aller ». La tradition prête cette sentence au calife Muʿawiya, acteur majeur de la première Fitna, période de guerres successives dont il sortit vainqueur en 661. Éloge de l’équilibre fluctuant, la métaphore suggère que la stabilité n’est pas un horizon de sortie de crise. Dès lors, comment organiser ces forces en action ? Que se passerait-il si le cheveu venait à se rompre ?
L’exposition Le Cheveu de Muʿawiya s’intéresse à la façon dont nous donnons du sens aux périodes de tumulte. Elle puise pour cela dans les imaginaires liés au mot fitna, qui désigne traditionnellement les crises politiques de l’Islam des origines. Les significations complexes de fitna renvoient aussi bien au trouble amoureux qu’à celui du corps social. À travers cette analogie, l’exposition appelle à embrasser les expressions désordonnées de la liberté.
La lecture du livre La Grande Discorde (1989) de l’historien tunisien Hichem Djaït (1935-2021) a accompagné la conception de cette exposition. Le Collier de la colombe, traité sur l’amour composé par le poète Ibn Hazm au XIe siècle, a donné matière au rapprochement entre trouble politique et trouble passionnel. Les œuvres montrées sont le fruit d’une réflexion partagée avec une vingtaine d’artistes de Tunisie et d’autres horizons. Nombre d’entre elles furent spécialement conçues lors de résidences au 32Bis.
Nadine Atallah, commissaire de l’exposition